Les stéréotypies sont généralement perçues comme étranges et inquiétantes. Les médecins tentent d’ailleurs de les faire disparaître la plupart du temps. Pourtant, les stéréotypies ont une fonction bien plus profonde qu’il n’y paraît. En cherchant à les gommer à tout prix, ne passe-t-on pas à côté d’une clé précieuse pour comprendre et entrer en contact ? Dans cet article, nous vous proposons de poser un autre regard sur les stéréotypies de votre enfant.

Stéréotypies, qu’est-ce que c’est ?

Stéréotypies : définition

Avant de rentrer dans le vif du sujet, il est important de revenir sur la définition des stéréotypies et le rôle qu’elle joue chez le jeune enfant.

Définition

Selon le DSM-5 (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, 5e édition), les stéréotypies sont qualifiées de comportements répétitifs et restreints. 

Joseph Berkson – médecin, physicien et statisticien – a défini les stéréotypies selon 5 critères. Elles représentent ainsi un comportement : 

  • volontaire ;
  • manquant de variabilité ;
  • inhabituelles par rapport à l’âge ;
  • ne changeant pas selon l’environnement ;
  • persistant dans le temps.

Un rôle dans l’auto-régulation et la gestion sensorielle

Bien qu’elles semblent venir de nulle part, les stéréotypies remplissent différentes fonctions. En effet, ces gestes ou mots répétés apparaissent souvent en réponse à une situation stressante ou tout simplement lorsque l’enfant s’ennuie.

Elles permettent également à l’enfant de s’auto-stimuler, de retrouver son calme ou bien de s’isoler dans sa bulle sensorielle pour se protéger d’un environnement trop stimulant.

Pendant longtemps, les stéréotypies ont été stigmatisées. On cherchait à les effacer à tout prix, pensant qu’elles coupaient l’enfant de la réalité. 

Aujourd’hui, les recherches et les pratiques de terrain redonnent à ses manifestations une place plus juste. 

Et si, au lieu d’être un obstacle, elles devenaient une passerelle vers l’autre ?

Comment se manifestent les stéréotypies chez l’enfant ?

Stéréotypies : manifestations

Pour mieux comprendre les stéréotypies, il suffit d’observer attentivement le comportement de l’enfant. 

Les différentes stéréotypies

À savoir qu’il existe des stéréotypies : 

  • motrices, correspondant à des mouvements répétitifs comme le balancement ou encore le flapping (une manifestation caractéristique chez les enfants autistes, consistant à battre des mains très fort) ;
  • maniérisme moteurs, se traduisant par une démarche particulière ou une posture inhabituelle du corps ;
  • vocales, aussi appelées écholalies. C’est lorsque l’enfant répète un même mot ou phrase avec la même intonation que le modèle d’origine ;
  • sensorielles, qui se manifestent par la recherche d’une stimulation visuelle ou auditive par exemple ;
  • liées aux objets. L’enfant s’approprie un objet ou une partie de cet objet de manière répétitive (ouvrir et fermer la portière d’une maison en continu par exemple).

Quand apparaissent-elles ?

Nous l’avons expliqué plus haut, les stéréotypies apparaissent principalement lors d’une situation stressante. Lorsque les stimuli extérieurs deviennent trop envahissants, l’enfant peut se sentir agressé. Ses stéréotypies l’aident alors à retrouver un équilibre, à reprendre le contrôle sur son environnement.

Ces comportements peuvent aussi émerger dans des temps calmes, voire creux. Lorsqu’il s’ennuie ou qu’il se retrouve dans un moment informel, l’enfant comble ce vide en se recentrant sur lui-même. C’est sa façon d’occuper l’espace intérieur, de s’apaiser et de se reconnecter, à sa manière.

Les stéréotypies chez Poulpi

Les stéréotypies chez Poulpi

Vous le savez, chez Poulpi, nous accueillons des enfants neuroatypiques. Ainsi, dès le plus jeune âge, nous les accompagnons dans le but de les rapprocher de notre réalité, sans pour autant effacer qui ils sont. 

Stéréotypie ou ism ?

Nous avons fait le choix de ne plus parler de stéréotypies, car c’est devenu un mot trop chargé de jugement, de crainte ou d’incompréhension.

À la place, nous parlons d’«isms », qui nous vient du Son-Rise Program. C’est un terme plus neutre, plus doux, qui nous aide à poser un regard nouveau sur ces manifestations. 

Cette nuance de vocabulaire n’est pas un détail. Au contraire, elle reflète même toute une philosophie d’accompagnement. Ici, les comportements répétitifs ne sont ni interdits, ni combattus. Ils sont observés, compris et respectés.

Un ism est une stratégie mise en place par l’enfant. À nous d’identifier sa fonction !

Un levier plutôt qu’un frein

Notre approche s’appuie sur la pédagogie DAISEE. Ce programme est un accompagnement individualisé qui place la relation au cœur de chaque interaction. Dans ce cadre, les isms deviennent des portes d’entrée vers le monde de l’enfant.

Ainsi, plutôt que de chercher à les faire taire, nous les imitons avec sincérité, avec enthousiasme, nous les accueillons. C’est en reproduisant un geste, un son ou un mouvement que nous entrons doucement dans leur univers. Et c’est souvent à ce moment-là qu’un regard se lève, qu’une attention se crée et qu’un lien se crée.

Ce premier contact, si fragile et si précieux, nous permet ensuite de guider progressivement l’enfant vers notre réalité. Pas à pas, au rythme de sa confiance.

Chez Poulpi, les isms ne sont donc ni un obstacle, ni une bizarrerie à corriger. Ils sont un levier relationnel, une passerelle vers l’interaction conjointe.

Faut-il craindre d’imiter un ism ?

C’est une inquiétude qui revient fréquemment. Les parents se demandent s’ils ne vont pas renforcer les comportements de leur enfant en imitant ses isms. Ne vont-ils pas le couper encore plus du monde réel ?

En réalité, c’est tout l’inverse.

En effet, lorsque nous imitons un ism, nous n’encourageons pas son isolement, nous entrons en contact. L’enfant est donc invité à créer un lien et, petit à petit, c’est lui qui nous rejoint.

Sachez qu’une fois que la connexion est établie, l’ism peut évoluer ou même s’estomper naturellement, sans aucune contrainte, parce que : 

  • l’angoisse diminue, les isms aussi ;
  • nous montrons à l’enfant de nouvelles manières de jouer, de bouger et/ou de s’exprimer ;
  • Nous répondons autrement au besoin sensoriel qu’exprimait l’ism.

Encore une fois, tout cela se fait naturellement, en douceur, dans le respect du rythme de l’enfant. 

Nous ne cherchons pas à supprimer un comportement, nous en comprenons sa fonction et nous accompagnons l’enfant vers d’autres possibles.

Rappelez-vous qu’à chaque fois qu’on empêche un ism de s’exprimer, il se manifestera autrement. Alors qu’un ism écouté, compris et accueilli peut devenir le premier chapitre d’une histoire partagée.

Le mot de la fin

Les stéréotypies ont longtemps été perçues comme des obstacles. Chez Poulpi, elles ne sont ni une anomalie, ni un signe à faire taire. Elles sont plutôt une réponse, un besoin et même un véritable levier dans la relation à l’autre.

Vous l’aurez compris, ces gestes ou mots répétés peuvent aider l’enfant à se réguler, se protéger ou encore à s’occuper. Ils apparaissent souvent dans des moments de stress ou dans les temps morts. Mais ils peuvent aussi devenir une véritable passerelle vers la relation si on choisit de les regarder autrement.

Alors, la prochaine fois que votre enfant « isme », prenez un instant. Observez, notez les moments où les isms surviennent et essayez de les imiter. Pas pour provoquer une réponse ni même espérer un contact immédiat. Contentez-vous d’entrer dans son monde, de le rejoindre là où il se sent bien.

Nous cherchons si souvent à guider ces enfants vers nous, alors, pour une fois, pourquoi ne pas faire le premier pas vers eux ?

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